Interview MyRankArt – 2019

1/ Pouvez-vous présenter l’artiste sculpteur que vous êtes en quelques mots?

j’ai 34 ans, papa d’une petite fille et je gagne ma vie depuis près de 15 ans en sculptant des personnages en pâte à modeler ! (pour reprendre l’expression d’un ami).

2/ Quel a été le parcours professionnel et artistique qui vous a forgé en tant que sculpteur ?

Mes souvenirs les plus lointains me montrent un enfant continuellement entrain de dessiner, de fabriquer des maquettes en cartons, des personnages faits de vis et de scotch d’électricien…j’ai toujours eut besoin de construire des représentations matérielles de mon imaginaire. Adolescent j’ai joué aux wargames et collectionné des figurines à peindre, puis je les ai transformé et finalement faites de A à Z. Cette passion m’a mise en contact avec des professionnels du milieu (éditeurs de jeux et figurines), on m’a proposé quelques commandes en freelance et puis je n’ai plus fait que çà…

j’ai coutume de dire que ce métier m’a choisit, au départ j’étais plutôt attiré par le dessin, la sculpture s’est imposée à moi au fil d’opportunités professionnelles.

Ma pratique comporte actuellement deux aspects, la sculpture de miniatures d’un coté qui m’assure mes revenus, de l’autre mon travail personnel, des pièces uniques, statuettes, céramiques, dessins…

3/ Qu’est ce qui, selon vous, vous a orienté vers la sculpture plutôt qu’un autre mode d’expression ?

L’attrait pour le volume, l’objet, le personnage, le jouet que l’on peut toucher, manipuler, qui occupe une place concrète dans l’espace. J’ai souvent envie de toucher les sculpture dans les musées, je le fais parfois mais je me retiens la plupart du temps, l’œil des surveillants n’étant pas loin…c’est dommage, une sculpture doit aussi se percevoir par le toucher, lorsqu’elle n’est pas trop fragile bien entendu.

4/ Votre vie et ses étapes influencent-t-elles l’orientation de votre travail et de quelle manière ?

j’ai l’impression que ma vie quotidienne est plutôt séparée de mon univers artistique, qui corresponds à mon imaginaire. Je me suis souvent demandé comment faire tendre l’un vers l’autre et s’il le fallait ? Peut-être qu’en se rapprochant ils deviendraient respectivement plus puissants ? Mon imaginaire est nourrit d’éléments réels, mais reste un imaginaire et en tant que tel il est un refuge, un espace privilégié qui se superpose mais n’intègre pas vraiment ma vie plus…triviale (un peu dur comme jugement).

5/ Comment définiriez-vous votre travail artistique ? Que dites-vous de vos sculptures à une personne qui ne les a jamais vues?

Très simplement, sculptures de figurines et statuettes, figuratives, réalistes et détaillées. j’évoque les influences des « arts premiers » dans mes créations personnelles. Les personnes qui découvrent mon travail sont surtout stupéfaites par la minutie et la qualité des détails, c’est un peu frustrant car pour moi l’intérêt premier n’est pas là, cependant je comprends leur réaction.

6/ Qu’est ce qui, de façon générale influence votre démarche (peintre, cinéma, musique, auteur…) ?

Comme dit plus haut, les arts « premiers » et plus précisément les cultures préhispaniques des Amériques occupent une place importante dans mon imaginaire, autant esthétiquement que spirituellement. j’incorpore dans mes créations des styles, couleurs, idées issues de ces cultures, comme pour faire partie de leur monde ? Ou les diffuser, à ma manière ?

7/ Quel est le point de départ d’une sculpture (un schéma, une image, le hasard, l’imagination seule, un peu de tout ça) ?

Concernant la partie « commande » il s’agit souvent d’une illustration, plus rarement un échange d’idées et de références. Dans ce cas je suis globalement un exécutant, bien que j’ai la chance d’inscrire mon style dans la sculpture et de prendre des décisions stylistiques parfois importantes, les clients me faisant confiance.

Dans mon travail personnel c’est différent, disons que j’ai un catalogue d’idées et de thèmes en tête desquelles vont émerger quelque chose de plus précis. Pour moi c’est comme un travail inconscient qui se déroule en parallèle de mes autres travaux, la sculpture se construit en faite d’elle même dans mon esprit. Quand c’est mûr çà sort tout seul et à ce moment là il peut m’arriver de faire des dessins, puis je pense aux contraintes techniques et je démarre. Ce processus est assez long et plusieurs mois peuvent s’écouler entre cette émergence discrète et la pièce réalisée.

8/ Quels conseils donneriez-vous à un sculpteur débutant ?

Alejandro Jodorowsky dit que pour préserver son art il ne faut surtout pas en vivre…je suis assez d’accord, même si d’un autre coté je trouve çà génial d’être rémunéré pour ce que l’on crée. Mais il est évident qu’à la longue, la commande, le collectionneur, ou n’importe quelle tierce personne qui souhaite influencer votre créativité risque de vous l’abîmer.

9/ Avec quel artiste sculpteur aimeriez-vous entretenir ? Et pourquoi ?

Étrangement j’ai peu le désir de parler avec d’autres artistes, et souvent lorsque je le fais les échanges sont bref ou ne concerne pas directement nos pratiques ! Ceci étant dit, il m’est quand même arrivé d’avoir des discussions très intéressantes autour de ce qui nous anime.

En y réfléchissant, rencontrer des sculpteurs traditionnels, qui font par définition un art sacré m’intéresserait.

10/ Selon vous, à partir de quel moment un sculpteur, un photographe, un musicien, un peintre… devient un artiste ?

Peut-être lorsqu’il travaille uniquement pour lui même, sans commanditaire, sans nécessité économique ou d’ego…lorsqu’il ne fait çà pour « rien » mais que c’est la chose la plus importante à faire. Il devient un canal, un medium, il reçoit une information du monde et la matérialise.

11/ Quelle exposition d’un autre artiste vous a le plus marqué ?

Je ne saurais dire…je vais en citer plusieurs !

Une expo sur « Jackson Pollock et le Chamanisme » à la pinacothèque de Paris il y a une dizaine d’années. « les Maîtres du désordres » au Musée du Quai branly. Expo sur Jean Carriès au Petit Palais. Le musée d’Anthropologie de México. j’aime aussi visiter les lieux de vie d’artistes, j’ai en tête la Casa Azul de Frida Khalo à Coyoacan, ou les maisons-ateliers de Joan Miro à Mallorca.

12/ Quel est votre plus fort souvenir d’artiste ?

Je ne sais pas quoi répondre, je crois que j’ai une vie d’artiste plutôt plate…dans les moments agréables il y a la découverte par d’autres de ma dernière pièce, entendre ou lire leurs réactions. Ou encore un vernissage d’exposition faite en 2017, chouette instant !

13/ Avez-vous des activités qui gravitent autours de votre casquette de sculpteur ?

Un peu de dessin, de peinture…

14/ Artistiquement parlant, y a-t-il un rêve que vous n’avez pas encore réalisé ?

Ah ! Tout est à faire ! J’aimerai arriver à faire une ou des séries de pièces liées par un thème et les exposer avant de devoir les vendre. J’adorerai montrer un travail de réappropriation de pièces précolombiennes (qui n’existe donc pas encore!) au Mexique…

15/ Avez-vous une actualité artistique ? Si oui, quelle est-elle ? Quels sont vos projets ?

Je vais sans doute faire quelques manifestations comme chaque année, mais plutôt liées à la partie figurine. J’espère avoir du temps pour faire plus sérieusement de la céramique cette année.

16/ Pour se faire une idée de votre personnage de façon plus générale, j’aime bien soumettre à nos artistes interviewés les questions un peu naïves du thème de l’île déserte…

-Sur une île déserte vous emportez…

*Quel film ?

Je ne crois pas que je prendrais un film…mais je vais répondre, un Jodorowsky, j’aime vraiment son cinéma, ses œuvres récentes en particulier.

*Quel livre ?

Un que je n’ai pas encore lu ! Un écrit qui questionne profondément, qui aborde le spirituel, voir la mystique.

*Quelle musique ?

Mmm, un truc puissant, avec des voix, des chants traditionnels ? Ou peut-être les Doors.

*Quel objet ?

Un couteau, c’est pratique, et on peut sculpter avec!

*Laquelle de vos œuvres?

La première version de Courgeritte…ou peut-être ma fille…ahah.

17/ Quel voyage aimeriez-vous encore faire ?

J’ai régulièrement envie de retourner en Amérique Latine, et au Mexique plus précisément pour y plonger plus profondément cette fois ci.

18/ Quelles étaient vos ambitions d’enfant pour votre vie d’adulte ?

Enfant je pensais ou voulais le rester, je ne croyais pas à mon propre devenir d’adulte. Adolescent j’ai quand même compris, peu à peu que çà arriverait, là encore je n’en avais pas bien envie, sans doute les modèles adultes autour de moi n’étaient pas bien inspirants, ou je ne savais pas regarder. Tout çà pour dire que je n’avais pas vraiment d’ambitions réelles, j’aurais sans doute voulut être transporté dans un de mes mondes imaginaires, quitter ce qui ne me plaisait pas (épreuves de vie, école…) et devenir un personnage fantastique, un héros étrange dans un monde fabuleux.

Merci !

Merci à vous !